mardi, mai 22, 2007

Pamplona --> Puente La Reina

Ce matin à six heure, le barbu nous réveille en jouent un air d'accordéon. Dans la bonne humeur, je refais mes pansements avant la route. Pour quitter la ville, il faut suivre la route, les périphériques nous oppressent et nous sommes pressé de retrouver la campagne. Une fois sorti de la ville, l'Espagne devient plus conforme à celle que je connaissais, sèche et rouge, sur les collines poussent des chênes verts, de coquelicots et de genêts. Des églantiers en fleurs bordent le chemin, je m'arrête pour observer la symétrie presque parfaite de leurs pétales.

C'est notre premier jour de soleil et nous pic-niquons à midi, pile sous le zénith. Le dessert avalé, je suis foudroyé par le sommeil et je m'effondre dans l'herbe.

Le soir nous atteignons Puente-la-Reina, comme son nom l'indique, ce village est surtout connu pour son pont, il s'en dégage une heureuse harmonie. Je vais au bord de la rivière gouter le calme d'un soir d'été, quelques instants, je contemple, immobile une fois que le peuple des touristes à regagné ses casemates. Je suis inspiré, j'affûte mes crayons pour écrire sur mon cahier.

L'onde légère de l'Arga glisse sous une tache d'or

Vestige d'un soleil las de ses éclats

Pas mal ! Je continue : Ô Grand Fou ...

Les hirondelles se peignent le ventre au ras de l'eau

Des pollens morts glissent, inutiles sous les ponts.

C'est très bon ! Je suis en apesanteur.



Le retour à l'albergue est d'une autre teneur. Notre dortoir se trouve dans le soubassement d'un hôtel. Cristina protestait, mais je n'ai pas écouté, j'étais fatigué. Dans les conversations, bien que différentes langues étrangères se mélange, je devine qu'on ne parle que d'ampoules, de pansements, de popotes et d'auberge... Dans la conception majoritaire, le chemin de Santiago donne lieu à des échanges pathétiques dans le premier sens du terme, comme n'importe quelle une autre tribulation touristique.

Moi qui espérais trouver des âmes torturées ou illuminées, me voilà bien déçu. En particulier, je reste avec mes questions et mon envie de révolte. Chaque fois que je lie conversation un peu sérieuse, je demande une explication de ce qui a poussé mon interlocuteur à prendre la route. J'aimerais trouver un compagnon de palabre pour chier constructivement sur la société, mais hélas, je ne trouve que des agneaux ou des cochons...

Quand je soumets la Question : « Pourquoi ? » Le problème est effleuré, on me répond, en mettant la main sur le coeur et le regard vague, que c'est pour des raisons spirituelles... Je demande d'élaborer sur le thème, de broder un peu, mais obstinément le développement bute sur ce mot tarte à la crème : spiritualité. C'est pathétique !

Le pathétisme est une lame de fond qui emmène dans sa traîne même ceux qui voulaient y échapper, il s'auto-entretien et se recycle lui-même. C'est une passion pour les jérémiades, il justifie quasiment le nihilisme. Les randonneurs relisent leur guide une millième fois, pansent leurs pieds, étudient le dosage idéal du stock de pâte et il budgétisent les jours à venir, de sorte que leur esprit est si préoccupé de choses ordinaires qu'il n'est pas besoin de s'évader, ni d'ouvrir aucune fenêtre. Autrement, on courrait le risque d'attraper un rhume des idées. Par exemple, je suis frappé que personne ne m'ait parlé de son métier. Comme dans des vacances ordinaires, ici on est venu avant tout pour oublier.